13.1.2024
Enfants sans tabac : la CSSS-N bafoue la volonté populaire
La mise en oeuvre de l’initiative populaire « Enfants sans tabac » telle que proposée par la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil national (CSSS-N) dans la loi sur les produits du ta-bac est anticonstitutionnelle sur plusieurs points. Il est particulièrement choquant que la publicité pour le tabac serait encore davantage autorisée que dans la loi insuffisante de 2021. Ce faisant, la CSSS-N ne respecte pas la volonté du peuple et des cantons. Le Conseil national doit maintenant prendre des me-sures correctives.
La publicité pour le tabac, les cigarettes électroniques et d’autres nouveaux produits à base de nicotine ne doit pas atteindre les enfants ni les adolescents. C’est ce que le peuple et les cantons ont clairement décidé en votant oui à l’initiative populaire « Enfants sans tabac » en février 2022. La loi sur les produits du tabac doit être adaptée en consé-quence. Mais la CSSS-N ne veut pas corriger la version déjà anticonstitutionnelle décidée par le Conseil des États : « Dans notre démocratie, les décisions populaires doivent avoir des conséquences. Il est absolument inacceptable que la commission de la santé refuse de mettre en oeuvre un texte constitutionnel aussi clair », commente le Dr Philippe Luchsin-ger, président de mfe Médecins de famille et de l’enfance Suisse et membre du comité de l’Association « Enfants sans tabac ».
Pas d'exceptions diffuses en matière de publicité et de sponsoring
La coalition des organisations porteuses de l’initiative désapprouve la proposition de la CSSS-N d'autoriser des exceptions non précisées pour la publicité et le sponsoring en pré-sence de mineurs. La formulation délibérément diffuse ouvre la porte à l'industrie pour qu'elle puisse complètement contourner l'article constitutionnel à sa guise.
La promotion des ventes dans l’espace public, c’est de la publicité
La CSSS-N refuse d’inclure le personnel de vente mobile présent dans des lieux publics où se trouvent des mineurs dans la mise en oeuvre de l’initiative acceptée par le peuple. La promotion des ventes est l’une des pratiques publicitaires les plus efficaces. La suppres-sion de l’article 19, alinéa 1, lettre c proposée par le Conseil fédéral est donc anticonstitutionnelle. En effet, le texte constitutionnel ne laisse planer aucun doute à ce su-jet : la disposition doit englober « toute forme de publicité qui atteint les enfants et les jeunes » – et donc aussi la promotion des ventes dans l’espace public.
Retour à la case départ pour la presse écrite
La proposition de la Commission de la santé revient sur l’autorégulation inefficace de l’in-dustrie du tabac : la publicité devrait rester autorisée dans la presse écrite qui sont « ma-joritairement vendus à des abonnés adultes ». Avec cette formulation, la publicité reste possible, malgré des dizaines de milliers de lecteurs mineurs.
Assouplissement inadmissible pour les festivals
La proposition de la CSSS-N de maintenir des zones VIP pour adultes sponsorisées par l’in-dustrie du tabac ou de la cigarette électronique est anticonstitutionnelle : même si les mi-neurs n’ont pas accès à ces zones, elles ont un effet publicitaire évident, tout comme le parrainage en soi. Tant que des mineurs se trouveront sur les lieux d’un festival ou de tout autre évènement, le parrainage ne doit pas être autorisé. C’est la seule façon de respecter la volonté populaire.
Les adolescents fument des cigarillos
Outre des détériorations massives, la CSSS-N a proposé une correction minimale avec la version proposée par le Conseil fédéral pour les cigarillos et les cigares. Selon une enquête représentative menée auprès des gymnasiens et des élèves des écoles professionnelles du canton d’Argovie, 8 % des jeunes de 15 à 17 ans avaient fumé des cigarillos ou des ci-gares au cours du dernier mois. Il est donc compréhensible que la Commission ne veuille pas faire d’exception pour les cigares et les cigarillos dans le projet de loi.
L'obstructionnisme de la CSSS-N met en danger la santé des jeunes
Le Parlement a adopté la loi sur les produits du tabac en 2021. Si le Conseil national suit sa commission de la santé (!), certaines dispositions relatives à la publicité et au parrainage seront même plus faibles que dans la loi de 2021, qui a rendu nécessaire l'initiative popu-laire. Par conséquent, certaines restrictions n'entreront jamais en vigueur, ou – à peine re-connaissables comme telles – au plus tôt dans deux ou trois ans. Une longue période pendant laquelle les enfants et les jeunes continueront d'être en contact quotidien avec une publicité offensive pour les produits du tabac et de la nicotine.
La consommation de nicotine chez les jeunes a augmenté : le Conseil national doit agir
La consommation de nicotine chez les jeunes a massivement augmenté. L’étude de 2022 « Health Behaviour in School-aged Children » menée dans toute la Suisse auprès d’éco-lières et d’écoliers montre qu’environ un tiers des jeunes de 15 ans avait consommé au moins un produit à base de nicotine dans les 30 jours précédant l’enquête. Lorsque les enfants et les adolescents sont en contact avec de la publicité pour le tabac, ils sont plus nombreux à commencer à fumer. Maintenant que leur protection a été acceptée par le peuple, sa mise en oeuvre rigoureuse dans la loi est donc impérative. Le Conseil fédéral a présenté au Parlement une proposition sans faille à cet effet. Le comité de l’initiative at-tend du Conseil national qu’il s’en souvienne lors de la session de printemps et qu’il ne suive pas les propositions de la CSSS-N sur les points cités.
Coalition des organisations porteuses de l’initiative populaire
L’initiative « Oui à la protection des enfants et des jeunes contre la publicité pour le ta-bac » est soutenue par les grandes organisations de la santé, en particulier la Ligue suisse contre le cancer, la Ligue pulmonaire, mfe Médecins de famille et de l’enfance Suisse, la fondation Addiction Suisse, la FMH, l’Alliance pour la santé en Suisse, l’Asso-ciation suisse des droguistes, la Société Suisse des Pharmaciens pharmaSuisse, pé-diatrie suisse, des médecins pneumologues et des cardiologues, sans oublier le Con-seil suisse des activités de jeunesse et la Croix-Bleue. Swiss Olympic, le Dachverband Lehrerinnen und Lehrer Schweiz et son pendant romand, le Syndicat des enseignant-e-s romand-e-s SER, ainsi que le Collège de médecine de premier recours ont égale-ment rallié les défenseurs de l’initiative.